À partir des années 1890-1930, l’industrialisation du littoral de Fos/étang de Berre s’intensifie et se diversifie. Cette croissance industrielle est le résultat de plusieurs dynamiques impulsées par des entrepreneurs venus de Marseille, du reste de la France ou de pays étrangers. Le territoire de Fos/étang-de-Berre s’internationalise.
À partir des années 1890-1930, l’industrialisation du littoral de Fos/étang de Berre s’intensifie et se diversifie. Cette croissance industrielle est le résultat de plusieurs dynamiques impulsées par des entrepreneurs venus de Marseille, du reste de la France ou de pays étrangers. Le territoire de Fos/étang-de-Berre s’internationalise.
Les industriels marseillais sont à la recherche de terrains spacieux, libres, bon marché et bien desservis par les voies de navigation ou de chemin de fer pour échapper à l’encombrement des bassins du port de Marseille, dédoubler ou délocaliser de vieilles usines enchâssées dans l’espace urbain ou lancer de nouvelles productions. Plusieurs branches sont concernées : minoterie (Gautier frères à Port-Saint-Louis-du-Rhône), cimenterie (Romain Boyer à Fos), construction et réparation navale (Chantiers et ateliers de Provence à Port-de-Bouc ; Chantiers navals et chaudronneries du Midi à Martigues), épuration du pétrole (La Phocéenne à Port-de-Bouc), l’huilerie-savonnerie (Etablissements Verminck à Martigues) et construction aéronautique (Port-de-Bouc, Martigues, Istres et Marignane). Ces entrepreneurs sont appuyés par la Chambre de commerce et d’industrie de Marseille qui depuis la fin du XIXe siècle cherche à faire de l’étang de Berre le faubourg industriel de Marseille et obtient, par la loi du 24 octobre 1919, la construction et le contrôle d’un nouveau port dans le chenal de Caronte (appelé les Annexes). Ces investissements marseillais rencontrent ceux des industriels français dont les usines ont été détruites par les bombardements de la Première Guerre mondiale (Saint-Gobain ; Kuhlmann). Ces derniers s’installent dans le chenal de Caronte pour approvisionner en explosifs la poudrerie de Saint-Chamas (fondée en 1690), avant de se reconvertir dans la production des engrais chimiques. S’ajoutent enfin les investissements des compagnies pétrolières nationales et étrangères – André fils (Port-Saint-Louis-du-Rhône) ; Société générale des huiles de pétrole (Lavéra), filiale de l’Anglo-Persian Oil Cy ; Bedford Petroleum (Caronte) – soucieuses d’établir des dépôts de carburants loin des zones urbanisées pour les besoins de la navigation maritime et aérienne (l’aéroport de Marignane ouvre en 1922). L’essor de l’économie pétrolière s’amplifie avec les dispositions adoptées par les députés les 16 et 30 mars 1928 pour promouvoir et protéger le raffinage national. Profitant de ce nouveau cadre législatif, plusieurs sociétés s’engagent dans le traitement du pétrole brut. Dès 1929, la Compagnie des produits chimiques et raffineries de Berre, filiale de Saint-Gobain, puis de Shell (1947), entreprend la construction d’une raffinerie qui entre en production en 1931. L’usine est reliée à la voie ferrée Marseille-Miramas et alimentée en brut par son port privé de la Pointe. En 1932, la Société générale des huiles de pétrole implante à son tour une raffinerie à Lavéra qui entre en service en 1933. Enfin, en 1934, la Compagnie française de raffinage, filiale de la Compagnie française des pétroles (détentrice de la part française de l’Irak Petroleum Co), construit à la Mède une raffinerie qui entre en activité en 1935. Trois ans plus tard, ces trois raffineries traitent déjà un peu plus de 1,5 million de tonnes de brut, soit 25 % des importations nationales. 900 000 tonnes proviennent du Moyen-Orient alors qu’au niveau national le brut américain représente encore plus de 55 % des approvisionnements. À la même date, les importations marseillaises de produits pétroliers dépassent pour la première fois celles des oléagineux, de céréales et de sucres réunies. Cette industrialisation a de profondes répercussions sur l’urbanisme et la sociologie des lieux. En 1890, Martigues et Port-de-Bouc vivent principalement de la pêche et de l’agriculture. Les seuls établissements industriels sont une sècherie de morues, une fabrique de briquettes de charbons et une usine métallurgique, le tout représentant un effectif de l’ordre de 500 personnes. Le nombre des ouvriers est ensuite en progression constante : 720 en 1906, 1 790 en 1926, dont 43 % de Français, 25 % d’Italiens, 15 % d’Espagnols, 7 % de Grecs, 6 % d’Arméniens et 2 % d’Algériens. L’industrialisation du chenal de Caronte se fait par un large appel à la main-d’œuvre ouvrière étrangère.